Le 1er Juin, Eric RAOULT est intervenu au 10ème Forum pour la démocratie à Doha, au QATAR, sur la question du voile intégral en France. Ci-dessous, son intervention :
« L’identité Nationale, l’Immigration et la Foi », cet intitulé pourrait donner lieu à un quizz ou un questionnaire que je présente, maintenant, devant vous :
1- Est-ce une thèse universitaire défendue à la Sorbonne ?
2- Est-ce un sujet d’examen pour le Baccalauréat français ?
3- Est-ce le titre d’un livre de Nicolas SARKOZY, avant d’être Président de la République ?
4- Est-ce l’objet d’un article sur l’actualité politique européenne et française depuis 1 an ou 2 ?
5- Ou enfin, est-ce le sujet de cette session du 10ème Forum de DOHA ?
La bonne réponse est certes la 5ème proposition, mais vous auriez pu répondre aussi par le N°4.
En effet, comme Rapporteur de la Mission d’information parlementaire sur le port du Voile Intégral, et comme Ancien Ministre de la Ville et de l’Intégration du Président Jacques CHIRAC, Député, élu d’une circonscription de la banlieue parisienne, je voudrais tout d’abord partager complètement, avec Monsieur MAILA, qui est un des experts français sur ce dossier, auprès du Gouvernement, la présentation sur l’exception française de la laïcité, qui est un mot et un concept assez unique.
La laïcité française n’est pas une brimade publique antireligieuse, c’est une équité égalité d’un Etat qui permet la pratique de toutes les religions, sans avoir une religion d’Etat. Laïcité et République, deux mots qui proclament des valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité, inscrits sur la façade des Mairies françaises.
Ces 3 valeurs pour la République constituent et fondent l’idée française du Vivre Ensemble, dans le respect des différences des origines, des religions, des couleurs de peau.
L’actualité européenne récente sur le « voile intégral » ou du Niqab dans plusieurs Nations, sur l’implantation des minarets en Suisse, sur le débat français sur l’identité nationale, sur la politique des flux migratoires, sur les inquiétudes face à certaines formes d’intégrismes religieux ont pu donner lieu à des amalgames dans les opinions publiques. Ces évènements européens ou occidentaux ont montré qu’il était primordial, d’abord, de mieux connaître l’Islam dans sa diversité, pour éviter les amalgames et les peurs, dans le respect de l’identité de ces pays.
En France, le phénomène de l’apparition de la Burqa, du Niqab ou du voile intégral est nouveau et très limité.
Nouveau, car il n’existait quasiment pas, il y a plus de 5 à 7 ans.
Limité, car les différentes évaluations chiffrent entre 500 et 2000 femmes le portant, hors du Hidjab qui ne couvre pas tout le visage, qui en concerne plusieurs milliers de femmes.
L’Assemblée Nationale française a voulu une réponse équilibrée, réfléchie, efficace et pédagogique.
Equilibrée tout d’abord, face à une opinion publique catégorique et souvent réactive, le Chef de l’Etat français, Nicolas SARKOZY, a défini l’orientation, voici 1 an, lors du Congrès de Versailles, le 22 Juin 2009 : « La Burqa n’est pas la bienvenue en France ». Le Président de l’Assemblée Nationale française, Bernard ACCOYER, a pris l’initiative de créer une Mission d’Information pluraliste de 31 membres, Majorité et Opposition réunies, sous la Présidence du Communiste André GERIN, Député du Rhône, et dont j’ai été le Rapporteur, a permis d’obtenir un véritable document de référence, établissant un quasi consensus sur la nécessité de réglementer cette pratique.
Une réponse réfléchie, par un travail de 6 mois, avec l’audition de plus de 150 personnalités, universitaires et constitutionnalistes, d’acteurs de la Communauté musulmane dans sa diversité, du Président Mohammed MOUSSAOUI, Président du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM), mais aussi de Tariq RAMADAN, islamologue. Le Parlement français a refusé la réaction en préférant la réflexion qui associe toute la représentation de la Nation.
Une réponse efficace, après cette très large consultation des réalités de ce dossier, notre Mission d’Information a fait le constat que la Communauté musulmane de France ne percevait pas le port de la Burqa, ni comme un précepte religieux, ni comme une prescription obligatoire du Coran.
Nous avons donc proposé une réglementation dans l’espace public, pour obtenir que seul le port de la Burqa, ou voile intégral, soit interdit, sans interdire les autres voiles.
Le Gouvernement a confié à une Ministre femme, chargée de la Justice, Garde des Sceaux de la Constitution, de porter un projet de loi simple et précis, qui ne montre aucune religion du doigt, et qui précise seulement : « Nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage ».
Une résolution reprenant ce refus du voile intégral a été votée à l’unanimité par l’Assemblée Nationale, voici seulement quelques semaines (le 11 mai 2010).
Si le Projet de Loi est soutenu par une Majorité de Droite, l’Opposition de Gauche a proposé un autre texte, limitant cette interdiction au seul service public de notre pays.
C’est donc un très large consensus social qui se prononce.
Une réponse pédagogique :
Nous avons choisi la voie de la concertation auprès des fidèles, plus que de la contrainte policière. Pour faciliter une application comprise dans un pays tolérant qui accueille, sur son sol, la plus grande communauté musulmane de plus de 6 millions de personnes, et qui partage l’idéal français du vivre ensemble.
Nous voulons expliquer à ces femmes, non par l’arrestation, mais par une démarche citoyenne, les raisons de notre refus du communautarisme, et d’une certaine forme d’intégrisme, qui, pour nous, peut être une dérive fondamentaliste dans notre pays. Nous refusons le repli d’une partie de la population, nous refusons le voile intégral, car c’est pour nous, un rejet des valeurs de la République française.
Ce sont ces explications que nous voulons donner aux femmes, souvent récemment converties à ce qu’elles pensent être un Islam pur et traditionnel, tel qu’elles se le représentent, en Afghanistan ou dans l’histoire musulmane qu’elles veulent respecter, alors même, qu’une Majorité d’entre elles, n’est pas liée à l’immigration.
La pénalité de non respect sera de 150€ maximum, et un stage de citoyenneté pourra se substituer ou compléter cette amende.
D’autre part, pour les personnes qui contraindront une femme à dissimuler son visage, elles risqueront une peine d’1 an d’emprisonnement.
Enfin, nous attendons 6 mois, après la promulgation de la loi, pour mettre en application ces dispositions de la loi.
Ainsi, si la Belgique, l’Italie, l’Espagne, le Danemark, la Hollande, le Québec se posent la même question, la France tente sa propre réponse, qui est faite de respect de notre identité républicaine, d’un Etat tolérant envers la Foi et toutes les religions, mais qui partage aussi, une certaine idée de la dignité de la femme, comme de l’Egalité entre les femmes et les hommes.
Pour répondre à cette actualité d’un Islam moderne, il nous a paru important de procéder à ce rappel serein et ferme à ces valeurs de la République, car en France, la démocratie se vit à visage découvert.
Le Président Nicolas SARKOZY a donc eu raison de rappeler, lors de la présentation de ce Projet, que notre Pays empruntait, en conscience, un chemin exigeant, mais un chemin juste.
Je vous remercie.
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