Mon intervention sur le débat Identité Nationale hier à l'Assemblée Nationale
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat sur l’identité nationale est lancé, et plutôt bien lancé. Ceux qui en ont peur sont ceux qui le craignent ; ce sont ceux qui ne veulent rien, qui ne voient rien ou qui n’ont plus rien à dire. La France a beaucoup évolué, sa population a changé ; il faut être aveugle pour ne pas le voir.
Rappelons-le : ce débat est déjà un véritable succès, car il répond à une véritable attente et à une réelle demande des Français, ce dont témoignent les plus de 40 000 contributions publiées sur le site du débat – des contributions, riches, constructives, intelligentes – et les deux millions de pages lues.
Ce débat, c’est aussi un pays qui s’exprime, qui parle de son histoire, de ses racines, de ses valeurs, de son projet.
Monsieur le ministre, ne vous en faites pas : les socialistes aboient, mais la France vous soutien
car vous avez eu le courage de prendre cette initiative, avec le soutien du Chef de l’État. Ce débat est l’occasion de répondre à une véritable question qu’il convient de ne pas ignorer : aujourd’hui, qu’est-ce qu’être français ? Cette question ne devrait pas être un sujet de polémiques ou d’affrontements, mais offrir l’occasion d’un véritable engagement pour échanger des idées, partager des témoignages et faire progresser l’identité de notre pays.
Vous proposez un débat, quand d’autres, lors de la dernière campagne présidentielle, réclamaient un drapeau dans chaque foyer ; certains l’ont oublié. « L’identité nationale n’est pas un gros mot », indiquait, pour sa part, Nicolas Sarkozy, durant cette même campagne. Il avait raison !
Quand un pays oublie son identité, il va au-devant de bien des déconvenues, avant un douloureux réveil. Un proverbe africain, que je cite souvent, l’exprime clairement : « Quand on ne sait pas d’où l’on vient, on se sait pas où l’on va. » Quand un pays ne sait plus se regarder en face, il est amené à s’oublier, l’un des meilleurs moyens pour faire le jeu des extrémistes, de faire le jeu de tous ceux qui sont tentés par le communautarisme, la division et la rébellion. L’actualité le montre au quotidien, en France et à l’extérieur.
Certains pays engagent la même réflexion que le nôtre, mais dans la concertation et sans opposition. Je rappelle à nos collègues socialistes qu’en Grande-Bretagne, en Russie ou au Canada, il n’y a pas d’élections régionales. En France, faut-il préférer la culpabilisation qu’ils nous ont imposée durant tout l’après-midi ? Doit-on choisir l’autocensure, non pour diviser ou opposer, mais bien pour fixer des repères, des racines et les valeurs de notre unité nationale ?
Pour le gaulliste que je suis – il y en a un certain nombre dans l’hémicycle , notre identité, c’est Schuman, Debré, Michelet, mais aussi Guy Môquet, Jean Moulin, Maurice Thorez et Missak Manouchian.
Vous parlez, chers collègues, de la France de gauche et de la France de droite, mais, dans notre langage, il n’y a qu’une France. Mon propos ne fera pas plaisir à Mme Pau-Langevin, mais, puisqu’elle ne parle pas de Paris, je vais parler de la Seine-Saint-Denis. Dans ce que M. Calméjane a décrit comme un « département-monde », dont je suis un élu et qui compte une centaine de nationalités, l’identité, cela veut dire quelque chose. Le « 9-3 », qui est un peu le département témoin de la gauche, qui l’a de tout temps géré, est le premier département populaire, même si, malheureusement pour vous, monsieur Asensi, ce n’est plus une démocratie populaire. (Rires sur les bancs du groupe UMP.) Il est attaché à une vraie identité française, car la patrie, disait Jaurès, « est le dernier bien du peuple ».
Cette banlieue, c’est aussi le Grand Stade, la cité de la Muette à Drancy, la basilique de Saint-Denis et le cimetière musulman intercommunal de Bobigny. Notre débat doit être l’occasion de rappeler que la France n’est pas une race, une ethnie ou une religion, mais d’abord une idée : celle de nos valeurs républicaines. Notre identité nationale est avant tout faite de liberté, d’égalité et de fraternité – et maintenant de laïcité.
L’égalité a fait vibrer tous les Français à Saint-Denis, il y a un peu plus de dix ans, dans ce stade mythique qui porte le nom de la France et la mémoire de nos champions du monde qui s’appellent non Dupont ou Durand, mais Zidane, Djorkaeff, Thuram, Blanc ou Trezeguet.
Avec fraternité, la France a su accueillir des milliers de migrants – pas uniquement sous des gouvernements de gauche –, à commencer par tous les anonymes, nombreux sous notre sol, qui ont su reconstruire nos routes ou nos immeubles, et se sont battus courageusement à Verdun et Monte Cassino.
La liberté d’expression permet de voter, de manifester, de se syndiquer ou de critiquer un pays qui, à tout prendre, n’est pas si monstrueux.
La laïcité enfin, qui n’est pas le refus de toutes les religions, mais le respect de toutes les croyances, est unique en Europe.
Le débat sur l’identité nationale ne doit pas être un tabou ni un combat – c’est pourquoi je regrette l’attitude de la gauche dans notre hémicycle –, mais un échange et une discussion entre tous nos compatriotes, quelles que soient leur origine, leur religion et leur classe sociale.
L’identité de la banlieue, que je pense connaître aussi bien que nos collègues de l’opposition
L’identité de la banlieue, c’est cette identité du double respect, que le Président de la République rappelle aujourd’hui dans Le Monde : respect de ceux qui arrivent et respect de ceux qui accueillent.
Une vielle expression yiddish promet qu’on peut être « heureux comme Dieu en France ». Tous ensemble, montrons que nous pouvons être heureux et fiers d’être Français. C’est cela, l’identité de notre pays.
Monsieur le secrétaire d’État, pour ce débat, pour votre courage, que beaucoup ont salué dans cet hémicycle, et pour votre visite en Seine-Saint-Denis le 15 décembre, je vous remercie.
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